Bureaucratie - David Graeber
« Disons-le crûment : le problème n'est pas tant que les procédures bureaucratiques sont intrinsèquement stupides, ni même qu'elles provoquent souvent un comportement qu'elles définissent elles-mêmes comme stupide - bien que tout cela soit vrai. C'est plutôt qu'elles sont invariablement des moyens de gérer des situations sociales déjà stupides, parce qu'elles sont fondées sur la violence structurelle. »
David Graeber. Bureaucratie. Trad. Françoise & Paul Chemla. Les liens qui libèrent, 2015, p.71
« Dans les démocraties industrialisées contemporaines, l'usage légitime de la violence est confiée aux «forces de l'ordre», notamment aux officiers de police. Forces «anticriminalités», dit-on parfois par euphémisme. Je dis «par euphémisme» parce que des générations de sociologues de la police ont souligné qu'en réalité seule une toute petite partie de ce qu'elle fait a un quelconque rapport avec l'application du droit pénal - ou avec la criminalité en général. L'essentiel de son travail porte sur les réglementations, ou, - disons-le en termes un peu plus techniques - sur l'application scientifique de la force physique, ou de la menace de la force physique, pour faciliter la résolution de problèmes administratifs. Autrement dit, les policiers passent l'essentiel de leur temps à faire respecter toutes ces règles et réglementations sans fin précisant qui peut acheter, fumer, vendre, construire, manger ou boire quoi et où (...). Les policiers sont donc des bureaucrates armés. »
David Graeber. Bureaucratie. Trad. Françoise & Paul Chemla. Les liens qui libèrent, 2015, p.88-89
